Dans ce recueil de contes, Philippe raconte des événements tragiques d'un ton simple comme s'il s'agissait de choses banales. Et ses personnages se définissent autour d'une phrase : « que veux-tu », qui semble servir de fond psychologique à leur comportement. Cette phrase qui revient souvent dans les dialogues dénote leur simplicité : accepter le sort, adopter de plein gré une solution sans envisager toutes les possibilités et ne pas compliquer la situation. C'est pour eux le seul moyen de survivre dans un milieu difficile. Cette attitude ne change guère vis à vis de la mort. Quand ils ne peuvent plus subvenir à leurs besoins, ils concluent qu' « il n'est pas possible d'agir autrement », et envisagent le suicide. S'il en est ainsi, d'où provient cette attitude résignée? Philippe en avait bien décelé la source dans sa troisième œuvre, La Mère et l'enfant. Il s'agit de « la résignation des pauvres gens » à laquelle il était familier depuis son enfance. On peut penser que c'est cette idée qui fait dire aux « pauvres gens » ce « que veux-tu ». Philippe disait : « Le vrai romancier se place en plein milieu de ses personnages : il va de l'intérieur à l'extérieur ». Cela veut dire que le vrai romancier doit garder le même regard que ses personnages tout en conservant une certaine distance avec eux. Dans ces contes, s'assimilant aux « pauvres gens » avec la même perception de la vie et de la mort, Philippe les décrit avec objectivité. D'un côté les « pauvres gens » qui vivent et meurent en disant « que veux-tu », et de l'autre Philippe qui les décrit en reprenant leur « que veux-tu ». C'est cette position entre les deux aspects qui donne à l'œuvre un effet particulier, à la fois léger et empreint de gravité.