Les Mandarins, couronnés par le prix Goncourt en 1954, décrivent le trouble et le tourment des intellectuels de gauche après le dévoilement de l'existence des camps de travail soviétiques. Lors de la parution, nombreux étaient ceux qui ont considéré ce roman comme un <roman à thèse>, sans pourtant bien préciser le sens du terme. On le définit ici, tout en consultant les théories proposées par d'autres chercheurs, comme un roman qui soutient une thèse afin de prouver qu'elle est la seule vérité, et on essaie de confronter à nouveau le texte avec cette notion. Si on rapproche cette oeuvre autobiographique de la vie intellectuelle de Beauvoir, on voit émerger le <compagnonnage critique avec les communistes>, ligne qu'adoptaient Les Temps modernes à partir de la fin des années quarante, et la notion de <littérature engagée> que développe Sartre dans la Présentation de cette revue comme thèse qui est la préoccupation dominante chez les personnages principaux à travers tout le roman. Or, parmi de nombreux personnages présentés dans le roman, on remarque ceux qui représentent les idées politiques à leur manière, notamment un écrivain de droite, ancien collaborateur, ou un communiste fanatique, et on peut noter aussi une scène de la lecture d'un poète communiste. Leur description est marquée par la redondance négative avec la qualification en tant que personnage et avec la narration. Cette redondance, un des procédés fréquent dans le roman à thèse, sert à justifier la thèse: rester aux côtés du Parti communiste sans y adhérer et réaliser une littérature qui n'est ni de l'esthétisme ni de la propagande. Par ailleurs, cette thèse évolue chez les héros dans le déroulement du roman. Au début, leur action revêtissait un caractère idéologique. Mais l'affaire des camps de travail soviétiques et les échecs de leur tentative qui la suivent les amènent à remettre en question leur rôle d'intellectuel et l'efficacité de leur littérature. Leur choix final, celui de l