広島大学フランス文学研究 Issue 40
published_at 2021-12-25

ガストン・ルルーとドレフュス事件 : 『マタン』Le Matin 紙上のドレフュス事件関連記事から

Gaston Leroux et l’Affaire Dreyfus: ses articles dans Le Matin
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Abstract
Gaston Leroux croit en l’innocence d’Alfred Dreyfus et écrit, à partir du procès d’Esterhazy des articles favorables aux dreyfusards. Sa position semble à première vue surprenante si l’on considère les positions anti-dreyfusardes du Matin, pour lequel il travaille comme journaliste. Ce journal, fondé en 1884 par l’Américain Sam Chamberlain, propose au début des informations courtes recueillies par « les fils spéciaux ». Mais les successeurs de Chamberlain, Henri Poidatz et Maurice Bunau-Varilla, changent d’orientation, n’hésitant pas à publier des articles provocants et à lancer des campagnes tapageuses, qui font de journal un des plus grands quotidiens de la Belle Époque. Politiquement, le journal affiche une certaine neutralité en publiant des articles de journalistes de toutes tendances. La présence d’un journaliste comme Leroux est précieuse pour attester cette « neutralité ».
De plus, sa façon d’écrire les chroniques judiciaires peut être qualifiée de « neutre ». Ses articles sur un procès d’anarchistes en 1894 illustrent une de ses caractéristiques : il critique le manque de correction de l’accusé, tout en reprenant le plaidoyer de l’avocat, qui le défend et le présente comme une « victime de la société ». Ce style peut sembler équivoque, mais il convient à un journal comme Le Matin.
Une autre caractéristique apparaît dans les articles de Leroux sur l’Affaire du Marquis de Nayve, dont le procès est entrepris en 1895, neuf ans après la découverte de la victime - le jeune Hippolyte Ménaldo. En suivant le procès de cette affaire mystérieuse, le journaliste pointe les manquements d’une justice qui détermine le sort de l’accusé à la manière d’une loterie.
Il constate une autre faiblesse de la justice au moment de l’Affaire Dreyfus. Ancien avocat, il apprécie la solide argumentation des dreyfusards et la sincérité qu’il voit en eux, mais il les voit entravés par le camp anti-dreyfusard. Cela explique sa sympathie pour les dreyfusards mais aussi son indignation face à la pression exercée par les auditeurs et à la violence subie par l’avocat dreyfusard, qui menacent l’impartialité de la justice. Sa prise de position dreyfusarde est motivée par la crainte d’une erreur judiciaire autant que par celle d’une crise judiciaire.