広島大学総合科学部紀要. V, 言語文化研究 Volume 15
published_at 1990-02-28

『ロドギュンヌ』

Rodogune
Murase Nobuya
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Abstract
Corneille fit jouer Rodogune pendant l'hiver de 1644-1645; elle obtint un grand succès. A part ses quatre chefs-d'œuvre et le Menteur, cette pièce est celle qui a été le plus souvent représentée à la Comédie-Française de 1680 au 1942.

L'auteur lui-meme la préférait au Cid et au Cinna. D'apres ses témoignages, on peut indiquer deux raisons pour lesquelles il avait un faible pour elle.

Premièrement, il revendique avec plus d'insistance la paternité de cette tragédie que pour toutes les précédentes: "cette tragédie me semble être un peu plus à moi que celles qui l'ont précédée, à cause des incidents surprenants qui sont purement de mon invention, et n'avaient jamais été vus au théâtre". Sa justification ne manque pas de fondement. La pièce est bien construite jusqu'au 5ème acte, où domine un sentiment de terreur, éveillé par la coupe de poison qui passe de mains en mains. Mais elle parait avoir quelques défauts qui proviennent peut-être des efforts du dramaturge pour y créer une situation tendue et un suspens: par exemple, il y a une inchoérence frappante dans les actions de Rodogune.

La seconde raison est d'ordre moral; le personnage de Cléopâtre fascine tellement l'auteur qu'il en arrive à dire: "tous ses crimes sont accompagnés d'une grandeur d'âme qui a quelque chose de si haut, qu'en même temps qu'on déteste ses actions, on admire la source dont elles partent". On ne sait si un lecteur moderne trouve admirable la source d'où procèdent ses crimes épouvantables. Il est pourtant probable qu'il est touché par le caractère misérable de la condition humaine dont l'héroïne est le témoignage vivant. Car elle ne peut être que prisonnière d'une passion destructrice, l'ambition, en dépit d'une lucidité et d'une volonté qui nous surprennent.