広島大学フランス文学研究 32 号
2013-12-25 発行

『異邦人』と『幸福な死』

L'Étranger et La Mort heureuse
全文
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Abstract
L'Étranger de Camus, dont la première version a été achevée en mai 1940, et La Mort heureuse, conçu et composé de 1936 à 1938 (Jean Sarocchi), ont de nombreux points de ressemblance. Tout d'abord, la structure est la même : l'un comme l'autre se composent de deux parties contrastant vivement entre elles. Et la mort est placée avec habileté au début, au milieu et à la fin de chaque ouvrage. D'autre part, on trouve les mêmes épisodes et les mêmes personnages secondaires. Quant aux héros, ils présentent une affinité comme chez des jumeaux : leur nom (Mersault de La Mort heureuse et Meursault de L'Étranger), leur caractère et leur condition sociale, etc., se ressemblent. Tous les deux commettent un crime, mais se sentent à peine criminels. Ils désirent affronter la mort dans un état de lucidité et, confrontés à la mort, se croient heureux.

Cependant, le sujet est différent et, par conséquent, l'intrigue est tout à fait autre. Par ailleurs, le style (narration à la troisième personne et narration à la première personne) et l'emploi du temps des verbes (passé simple et passé composé) diffèrent également. En dépit de l'affinité frappante du caractère des héros, il existe quand même quelques nuances : tandis que Mersault change de vie, Meursault ne le veut pas. Alors que celui-là est jaloux, celui-ci est complètement étranger à ce sentiment.

C'est pourquoi, malgré de nombreux points de ressemblance, on ne saurait considérer La Mort heureuse comme la « matrice » (Jean Sarocchi) de L'Étranger. La Mort heureuse, c'est « un tout autre livre » (Roger Quilliot). D'autre part, dans ce récit inédit, Camus introduit ses expériences vécues presque telles quelles sans les avoir sublimées. Néanmoins, sans cette tentative ni cet échec de La Mort heureuse, Camus n'aurait pu écrire en si peu de temps la première version de L'Étranger, ni l'élaborer en tant qu'ouvrage artistique.